Notes de programme

Les quatre saisons

Jeu. 11 avr. 2024

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Programme détaillé

Antonio Vivaldi (1678-1741)
L’Olimpiade, RV 725

Sinfonia d’ouverture : Allegro

Concerto pour violon en mi majeur, «La primavera [«Le Printemps»], op. 8/1, RV 269

I. Allegro
II. Largo
III. Allegro

Sonate pour violoncelle et continuo en la mineur, op. 14/3, RV 43

I. Largo
II. Allegro
III. Largo
IV. Allegro

Violoncelle : Julien Barre

Concerto pour violon en sol mineur, «L’estate [«L’Été»], op. 8/2, RV 315

I. Allegro non molto – Allegro
II. Adagio e piano – Presto e forte – Adagio
III. Presto

Concerto pour quatre violons en si mineur, op. 3/10, RV 580

I. Allegro
II. Largo
III. Allegro

Violons : Julien Chauvin, Sabine Stoffer, Lucien Pagnon, Marieke Bouche

CONCERTO POUR VIOLON en fa majeur, «L’autunno»
[«L’Automne»], OP. 8/3, RV 293

I. Allegro 
II. Adagio molto 
III. Allegro

CONCERTO en sol majeur, RV 151, «SINFONIa alla Rustica»

I. Presto
II. Adagio
III. Allegro

CONCERTO POUR VIOLON EN fa mineur, «L’inverno» [«L’Hiver»], OP. 8/4, RV 297

I. Allegro non molto
II. Largo
III. Allegro

L’Olimpiade, RV 725

Sinfonia d’ouverture : Allegro

 

Durée : 1h15 sans entracte.

Coproduction Le Concert de la Loge / STS Événements – La Seine musicale / Auditorium-Orchestre national de Lyon / Conservatoire Jean-Baptiste-Lully de Puteaux.
Avec le soutien du Centre national de la musique.

Vente et dédicace à l’issue de la représentation à l’occasion de la parution du disque Les Quatre Saisons au label Alpha le 8 mars 2024. 

Distribution

Le Concert de la Loge
Julien Chauvin
violon et direction
Julien Barre violoncelle

Léo Abtouches, Andy Adrianasolo, Anthony Alves, Ange Amédée, Maelya Baugé, Camille Letullier et Lisa Medea danseuses et danseurs de Pôle en scènes

Mourad Merzouki chorégraphie
Sabri Colin assistant à la chorégraphie
Coline Serreau scénographie
Cécile Trelluyer lumières
Boris Buard assistant éclairagiste
Nadine Chabannier costumes

La Concert de la Loge est soutenu par le ministère de la Culture, la Ville de Paris, la Région Île-de-France, la Fondation Société générale C’est vous l’avenir et Aline Foriel-Destezet (mécènes principaux), Abéo, le Fonds de dotation Françoise Kahn-Hamm et les mécènes membres du Club Olympe. Il est en résidence au Conservatoire Jean-Baptiste-Lully de Puteaux et au Lycée Jacques-Decour de Paris, artiste associé en résidence à la Fondation Singer-Polignac, ensemble associé à l’Auditorium du Louvre. Il est également ensemble en résidence au Festival de Saint-Denis, soutenu par la Drac Île-de-France pour deux ans. En 2021, l’ensemble a entamé une résidence croisée de quatre ans avec l’Association pour le développement des activités musicales dans l’Aisne (Adama) et le Centre de musique baroque de Versailles.

Introduction

Comment entendre d’une oreille neuve une musique aussi rabâchée que Les Quatre Saisons ? Tel est le défi que se lance Julien Chauvin à la tête de son Concert de la Loge. Le propos narratif et théâtral qui structure la partition se déploie dans une création visuelle, scénographique et chorégraphique destinée à intensifier l’expérience du concert et à amplifier le champ sensoriel du spectateur, tout en conservant la musique au cœur du dispositif dramatique. Mourad Merzouki, dont les créations sont toujours au carrefour de multiples disciplines, propose des insertions chorégraphiques sur certains mouvements des pièces de Vivaldi, et les danseurs se mêlent aux musiciens du Concert de la Loge. La scénographie de Coline Serreau parachève cette relecture théâtrale et poétique.

Les Quatre Saions

Composition : avant 1725 (première version retravaillée par la suite).
Première publication : Amsterdam, Michel Le Cène, 1725, dans un recueil de concertos en parties séparées intitulé Il cimento dell’armonia e dell’invenzione.

En 1725, c’est à Amsterdam, grand lieu de l’édition, que le Vénitien Antonio Vivaldi fait paraître son deuxième volume de concertos : Il cimento dell’armonia e dell’invenzione (op. 8), dans lequel se trouvent les Quatre Saisons. Contrairement au précédent recueil de concertos (op. 3) qui mêlait des concerti grossi (faisant dialoguer plusieurs solistes avec l’orchestre), l’opus 8 ne présente que des concertos pour solistes (faisant intervenir un seul musicien soliste).

Rares sont les œuvres de Vivaldi qui ne se distinguent pas par un titre évocateur. Le titre général du recueil de l’opus 8, Il cimento dell’armonia e dell’invenzione [La Dispute entre l’harmonie et l’invention] fait référence au combat imaginaire entre la rationalité et la fantaisie, celle-là même que Vivaldi défend dans son jeu violonistique, héritier du courant des musiciens italiens de la fin du XVIIe siècle prônant l’inventivité des interprètes et le recours à toute sorte d’effets sonores expérimentaux. Quant aux Quatre Saisons, elles sont assorties de quatre sonnets écrits par Vivaldi lui-même après la composition pour décrire en mots ce que la musique illustre. Cependant, nul besoin de ce paratexte tant le discours musical est évocateur et limpide. Les scènes champêtres, les caprices du ciel ou encore la vie animale et végétale, chaque élément y est dépeint, à l’image d’un tableau vivant. L’ensemble constitue l’un des exemples les plus aboutis de «musique à programme».

Antonio Vivaldi, maître du concerto, en a composé plus de cinq cents. Et pourtant, parmi ceux qui nous sont connus, chaque concerto qui compose les Quatre Saisons est unique en son genre. Le Prêtre roux a poussé là les limites de la composition, expérimentant comme jamais les jeux sonores pour servir cette nouvelle musique descriptive. D’abord le violon est virtuose à l’extrême, déployant une technicité inédite. Les sauts d’archet, les changements de tempo, les effets de jeux variés et détaillés en font un exercice redoutable pour le soliste. Ensuite, la forme même de la pièce se trouve être plus complexe, dictée par les sonnets sur lesquels elle s’appuie. Enfin, la conduite générale propose tantôt un rythme effréné soutenant l’ensemble, tantôt un climat aquatique et mouvant suspendant le temps, le tout se succédant sans cesse dans un tableau aux mille couleurs. Renforçant ces effets de contraste, les strates orchestrales se décomposent en des textures de cordes variées et incroyablement inventives. Il n’est qu’à évoquer entre autres l’archet aérien et presque timide qui, soudainement, s’emballe et râcle la corde de façon quasi animale, ou encore les micro-tonalités, les trilles ou les glissandos, qui évoquent chacun une idée propre, celle de l’ivresse, du frisson ou du souffle.

Vivaldi bénéficie d’une telle réputation aujourd’hui, que nous en venons à oublier souvent qu’il n’a été redécouvert que récemment, bénéficiant d’un formidable travail de mise à jour ces toutes dernières années. Les Quatre Saisons, son œuvre la plus fameuse en son temps comme aujourd’hui, n’ont été exhumées que dans les années 1920-1930. En 1991, l’œuvre se refait une jeunesse, avec le célèbre enregistrement du violoniste Fabio Bondi à la tête de son ensemble L’Europa Galante. Cette interprétation ose le «baroque» : les tempi contrastés, autant dans le vif que dans le languissant, l’exagération des rythmes et des effets théâtraux, une sensualité exacerbée. Les Quatre Saisons profiteront ainsi durablement de cette renaissance, qui permet à chaque écoute une redécouverte continue de ce chef-d’œuvre absolu.

– Bénédicte Hertz

L’Olimpiade

Livret : Pietro Metastasio.
Création : Venise, Théâtre Sant’Angelo, 17 février 1734.

C’est au Théâtre Sant’Angelo qu’il dirige, donnant sur le Grand Canal, que Vivaldi fait représenter son nouvel opéra, L’Olimpiade durant le carnaval 1734. Voilà déjà une vingtaine d’années qu’il s’est imposé sur la scène lyrique européenne, et ce dramma per musica est sans aucun doute l’un de ses plus beaux opéras. Vivaldi y reprend à son compte un livret très récent, celui que Métastase a écrit quelques mois auparavant pour L’Olimpiade d’Antonio Caldara, représenté à Vienne à l’été 1733. À l’instar de nombreux livrets du poète qui connurent une postérité féconde, celui-ci sera utilisé plus d’une cinquantaine de fois au cours du XVIIIe siècle, notamment par Giovanni Battista Pergolesi qui en livra un chef-d’œuvre un an après celui de Vivaldi, puis par Leo, Jommelli, Sarti, Hasse, Traetta, Paisiello, Mysliveček ou encore Donizetti. L’intrigue, essentiellement amoureuse, se déroule au cours des Jeux olympiques antiques et déploie une palette de sentiments contrastés qui se dénoue dans la célébration de deux mariages.

L’ouverture de l’opéra, à l’italienne, se structure conventionnellement en trois parties (allegro, andante, allegro). Le premier de ces mouvements annonce l’intensité dramatique extrême de la composition. Il présente un traitement des cordes typique de Vivaldi, à la rythmique et aux contrastes efficaces.

– B. H.

Sonate pour violoncelle et continuo op. 14/3

Composition : [1720-1730].
Première publication : Paris, Mlle Michelon, 1740, dans un recueil de six sonates.

Des neuf sonates connues pour violoncelle que Vivaldi écrivit, six ont été assemblées en recueil, plus tard destiné à devenir le dernier opus de son œuvre instrumentale. Cet assemblage opportuniste, fait sans doute sans l’assentiment du compositeur, a été gravé à Paris en 1740 par Mlle Michelon et commercialisé, avec privilège royal, par les trois libraires parisiens de l’époque, les Le Clerc et Mme Boivin, sous le titre de Six sonates pour violoncello solo col basso. La Bibliothèque nationale de France conserve encore la seule source manuscrite connue de l’œuvre, de la main d’un copiste vénitien, ayant probablement servi de matrice à la gravure.

La publication de l’œuvre est relayée en décembre 1740 par le Mercure de France : dans la liste des nouvelles sonates pour violoncelle, Vivaldi côtoie les noms aujourd’hui presque oubliés de Lanzetti, Triemer, Somis, De Fesch ou Klein. Le genre de la sonate pour violoncelle était en effet à la mode depuis quelques années déjà en Europe, servant un instrument qui venait d’acquérir ses lettres de noblesse auprès de nombre d’amateurs exigeants. La publication répondait ainsi à l’attente du public parisien qui avait découvert en 1728 pour la première fois les Quatre Saisons aux concerts très prisés du Concert spirituel au château des Tuileries. 

Les quatre mouvements de la Sonate pour violoncelle et continuo en la majeur suivent le schéma invariable des six sonates du recueil, qui se rapproche d’une sonata da chiesa dans l’alternance des largo et allegro. Vivaldi adopte pour le violoncelle un traitement différent de celui du violon, auquel il réserve généralement une écriture virtuose et brillante, tandis qu’il préfère ici l’expressivité et la symbiose avec la basse continue – interprétée par un ensemble variable d’instruments (clavecin seul ou accompagné de basse d’archet, théorbe ou archiluth…).

– B. H.

Concerto pour quatre violons op. 3/10

Première publication : Amsterdam, Étienne Roger, 1711, dans un recueil de concertos en parties séparées intitulé L’estro armonico.
Dédicace : à Ferdinand de Médicis.

En 1711, Vivaldi fait paraître chez son nouveau libraire de musique, Étienne Roger, à Amsterdam, deux volumes réunis sous le même titre d’Estro armonico. Le grand succès de cette nouveauté engendre des réimpressions successives, suivies de publications à Londres puis Paris les décennies suivantes, saluant l’une des compositions les plus abouties du Vénitien et lui assurant une notoriété dépassant définitivement les frontières. Ce double recueil se compose de douze concertos pour cordes et fait suite à deux volumes de sonates (op. 1 & 2) qui connaissaient eux-mêmes une bonne fortune en Italie.

Vivaldi destinait sans doute ce recueil de compositions à ses jeunes élèves de l’Ospedale della Pietà à qui il enseignait le violon depuis 1703. Ce célèbre opus 3 est dédié à Ferdinand de Médicis, grand amateur et protecteur des arts, appelé à succéder à son père le grand-duc de Toscane, Cosme III.

Vivaldi fut un violoniste virtuose ; presque la moitié de ses compositions sont destinées à son instrument, à l’instar du recueil de L’estro armonico qui mêle des concerti grossi pour un, deux ou quatre violons. Le compositeur reprend à son compte le «concerto», tel que l’avait formalisé Giuseppe Torelli quelques années auparavant, mais l’enrichit d’une théâtralité géniale, qui s’appuie à la fois sur une virtuosité extrême et sur une dispersion maîtrisée des timbres. L’exceptionnelle exigence de l’écriture, le jeu inouï et calculé des contrastes contredisent d’eux-mêmes Igor Stravinsky, qui affirmait que «Vivaldi n’a pas écrit cinq cents concertos, mais le même concerto cinq cents fois».

Ce sont les transcriptions pour clavecin et orgue de ces concertos par Johann Sebastian Bach lui-même qui assurèrent en grande partie à Vivaldi une gloire posthume. Le Concerto pour quatre violons en si mineur, qui fait initialement dialoguer quatre violons solistes avec l’orchestre à cordes, la basse continue et un violoncelle solo, est celui que Bach choisira pour en livrer une adaptation unique en son genre à quatre clavecins, orchestre à cordes et continuo, le célèbre Concerto BWV 1065.

– B. H.

Sinfonia «alla rustica»

Composition : [1720-1730].

L’un des aspects les plus envoûtants de la musique d’Antonio Vivaldi est très certainement la grande ingéniosité avec laquelle il joue de la matière orchestrale. Le concerto ou encore la sinfonia d’ouverture d’un opéra paraissent être pour lui les lieux d’excellence pour exprimer les contrastes et mettre en scène l’opposition entre la vibrante consonance des unissons des cordes et la fragilité aérienne de la ligne mélodique du soliste. Dans le court Concerto «alla rustica», Vivaldi choisit plutôt le parti d’une écriture efficace, dans laquelle il laisse la part belle aux unissons et à une rythmique énergique, sans doute évocatrice du folklore auquel semble renvoyer le titre «à la [manière] rustique».

Le premier mouvement, Presto, se déploie dans un mouvement perpétuel, qui martèle des croches aux violons soutenues harmoniquement et rythmiquement par les valeurs pointées des pupitres d’alto et de basse. Une modulation introduit l’Adagio central, qui met en valeur un violon aérien et mélodique. L’Allegro final reprend la tonalité et l’esprit du premier mouvement.

– B. H.

Le Concert de la Loge

Violon et direction : Julien Chauvin 
Violons I : Sabine Stoffer, Yuna Lee, Lucien Pagnon, Anaïs Perrin, Agnieszka Rychlik
Violons II : Marieke Bouche, Hélène Decoin, Roxana Rastegar, Rachel Rowntree
Altos : Delphine Grimbert, Delphine Millour, Iñigo Aranzasti Pardo
Violoncelles : Julien Barre, Pierre-Augustin Lay, Jean-Baptiste Valfré
Contrebasse : Michele Zeoli
Théorbe : Léo Brunet
Clavecin : Louise Acabo