Du 19 au 23 novembre 2023

TOURNÉE EN ESPAGNE

Orchestre national de Lyon

Orchestre national de Lyon sur la scène de l'Auditorium

Deux ans après sa semaine de concerts en Russie, l’Orchestre national de Lyon est reparti sur les routes pour se rendre cette fois-ci en Espagne. Il a donné cinq concerts dans cinq salles emblématiques du 19 au 23 novembre 2023.

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Quelques chiffres

91 musiciens + 11 membres de l’équipe administrative et technique

54 caisses d’instruments et de matériel qui représentent 4,5 tonnes dont :
180 kg de partitions
30 violons, 12 altos, 10 violoncelles, 8 contrebasses, 4 timbales, 2 harpes

2 823 kilomètres parcourus par l’Orchestre national de Lyon

l’Europe au cœur de cette tournée

Le désir de représentation de la diversité et de l’unicité européenne est au cœur même de cette tournée de l’Orchestre national de Lyon, notamment dans le contexte actuel de guerre et de situation économique post-pandémie. Plus de dix nationalités européennes seront représentées pendant la tournée : espagnole, portugaise, autrichienne, danoise, allemande, française, suédoise, suisse, russe, italienne... tant parmi les musiciens de l’ONL qu’avec les solistes ou le chef. L’un des programmes de la tournée est également un des symboles les plus forts de fraternité, puisqu’il s’agit de la Symphonie n° 9 de Beethoven, d’où est tiré l’hymne européen.

Une tournée plus responsable

Suite à l’établissement du premier bilan carbone de L’AO en 2021, une réflexion a été menée pour repenser les déplacements de l’orchestre. La tournée de l’ONL en Espagne pour la saison 2023-2024 a ainsi été conçue de manière plus écoresponsable, notamment en termes de transports et en faisant appel à un chœur local.

ENTRETIEN AVEC NIKOLAJ SZEPS-ZNAIDER

La dernière tournée de l’Orchestre national de Lyon a eu lieu en février 2020 en Russie, juste avant la pandémie. Que représente cette tournée en Espagne pour vous aujourd’hui ?
Nikolaj Szeps-Znaider : Si je ne devais choisir qu’un seul mot, ce serait la « joie ». Bien sûr, partir en tournée est toujours une perspective heureuse, car c’est à chaque fois une nouvelle aventure musicale. C’est aussi la poursuite d’une aventure de tous les jours avec les musiciens, et la promesse de vivre des moments exceptionnels avec eux. Mais nous sommes surtout ravis d’exporter la musique et le talent de la ville de Lyon à l’étranger, tout cela dans une « Ode à la joie ».

L’orchestre a choisi de voyager en majorité par le train. Est-ce que c’est un choix important pour vous ?
N. S.-Z. : Quand les conditions pour voyager de cette manière sont bonnes, c’est la seule chose à faire, le bon choix, et je serai ravi de prendre le train moi aussi !

L’atmosphère de travail est-elle différente en tournée ?
N. S.-Z. : L’un des aspects les plus positifs d’une tournée, outre l’influence internationale de l’orchestre, est qu’elle créé un contexte nouveau qui rend les échanges peut-être un peu différents de ceux de la vie quotidienne. Ici tout le monde ne rentre pas chez lui à la fin d’une répétition ou d’un concert. Nous « vivons » ensemble en quelque sorte. Le travail en revanche reste le même et est toujours aussi intense pour donner le meilleur de nous-mêmes. Il y a aussi une difficulté supplémentaire liée au changement quotidien de salle, d’acoustique, d’ambiance. C’est toujours captivant de voir comment le programme évolue entre le premier et le dernier jour.

Parlez-nous un peu du programme musical.
N. S.-Z. : Deux extraordinaires solistes nous accompagneront sur la tournée : Maria João Pires partagera la scène avec Pinchas Zukerman pour un concert à l’Auditori de Barcelone dans la Sonate pour violon et piano n° 5 « Le Printemps » de Beethoven.

Pinchas sera également avec nous dans le Concerto pour violon d’Elgar, qui demande beaucoup à la fois au soliste et à l’orchestre, non seulement à cause de sa longueur, mais surtout pour son caractère passionné et nostalgique. C’est l’un des très grands concertos de la fin de la période Romantique (créé en 1910 par Fritz Kreisler et le London Symphony Orchestra). Il nous embarque dans des contrées tendres et poétiques, la campagne anglaise profonde (« Windflower theme »). L’une des caractéristiques remarquables de ce concerto est sa longue cadence, sans doute l’invention instrumentale la plus belle et la plus innovante d’Elgar !

En choisissant des œuvres de Richard Strauss et Mahler, je me fais un petit plaisir personnel, car ce n’est un secret pour personne que ce sont deux compositeurs avec lesquels j’ai une très forte affinité. J’aime particulièrement les jouer avec l’Orchestre national de Lyon, dont les qualités font merveille dans ce répertoire (entre autres).

De Strauss, nous proposerons quatre merveilleux Lieder : Heimliche Aufforderung, Zueignung, Morgen! et Cäcilie. « Blumine » de Mahler avait été inséré à l’origine dans sa Première Symphonie, mais il l’a finalement retiré, estimant qu’il modifiait l’architecture de sa « Titan » sans justification artistique. Redécouvert au début des années 1960, « Blumine » a été créé en juin 1967 au Festival d’Aldeburgh, sous la direction de Benjamin Britten.

La musique, tirée d’une série de tableaux vivants que Mahler avait écrits dans sa jeunesse pour illustrer un poème populaire allemand – Der Trompeter von Säckingen – est imprégnée d’une retenue poétique chatoyante. Son humeur maussade, évoquée par le thème principal simple et sentimental, est confirmée, après quatre douces mesures orchestrales, par une trompette qui fait appel à sa voix la plus lyrique. L’écriture transparente d’un petit orchestre, combinée à un matériau délicieusement naïf, donne lieu à un moment mahlérien sans la tension ni le stress caractéristiques du compositeur. C’est une musique qui coule dans les veines, un pur chef-d’œuvre.

Il y aura également deux symphonies au programme de cette tournée, et je ne parlerai pas de la Neuvième Symphonie de Beethoven, « Ode à la joie », qui rejoint ce que j’ai dit plus tôt sur la symbolique de ce voyage en Espagne, et que nous connaissons tous si bien. Dans son dernier mouvement, « Ode à la joie », devenu hymne européen, la symphonie parle de la fraternité des hommes, une notion qui semble aujourd’hui plus précieuse que jamais.

J’aimerais surtout parler de Brahms, qui a travaillé quatorze ans à sa Première Symphonie et y a réfléchi vingt ans. Tout Brahms est là : sa mélancolie, son humeur sombre, ses chansons qui ne vous lâchent jamais et sa poésie unique. Il nous ouvre les portes d’un monde lyrique immense, véhément et nostalgique. Aucune de ses compositions n’était plus importante que cette Première Symphonie, et c’est bien compréhensible.

Vraiment, plus j’y pense, plus je suis ravi du programme musical de cette tournée.

Les concerts de la tournée