Notes de programme

Thierry Escaich / Quatuor Tchalik

mer. 5 fév. 2025

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Programme détaillé

Improvisation à l’orgue

[4 min]

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Sonate d’église pour orgue et cordes en ut majeur, KV 336 (336d)

Allegro

[4 min]

Adagio et Fugue en ut mineur pour quatuor à cordes, KV 546

[8 min]

Sigfrid Karg-Elert (1877-1933)
Deux pièces pour orgue et quatuor à cordes, op. 48A

Reconstitution d’Emmanuel Pélaprat

– Sanctus
– Pastorale

[11 min]

Wolfgang Amadeus Mozart
Allegro et Andante (Fantaisie) en fa mineur pour orgue mécanique, KV 608

Transcription pour orgue et quatuor à cordes de Dania Tchalik

[11 min]

Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847)
Andante sostenuto pour quatuor à cordes en mi majeur , op. 81/1

[7 min]

Improvisation à l’orgue

[4 min]

Felix Mendelssohn Bartholdy
Capriccio pour quatuor à cordes en mi mineur, op. 81/3

Andante – Fugato : Allegro assai vivace

[6 min]

Thierry Escaich (né en 1965)
Prana, pour orgue et quatuor à cordes

Commande de la Philharmonie de Cologne/KölnMusik, de Pro-Quartet-CEMC et de la Philharmonie de Dresde

[12 min]

Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Six Duos pour piano et harmonium op. 8 (extraits)

Transcription pour orgue et quatuor à cordes de Dania Tchalik

IV. Capriccio
VI. Finale

[10 min]

 

Concert sans entracte.

Distribution

Thierry Escaich orgue
Quatuor Tchalik : Gabriel Tchalik, premier violon – Louise Tchalik, second violon – Sarah Tchalik, alto – Marc Tchalik, violoncelle

les œuvres

L’art de Thierry Escaich se nourrit d’amitiés fidèles, construites au fil de concerts, de résidences, d’académies et concrétisées dans des œuvres nouvelles et des enregistrements. Depuis plusieurs années, le compositeur entretient ainsi une collaboration fructueuse avec la fratrie Tchalik : les quatre frères et sœurs du quatuor et l’aîné, Dania, pianiste et auteur des arrangements de ce programme. 
Un premier disque, Short Stories, est né en 2019 autour de la pièce pour violon et piano qui lui donne son titre. Le projet suivant s’est bâti autour de Prana, pour quatuor à cordes et orgue. Créé à la Philharmonie de Cologne le 5 octobre 2022, repris deux semaines plus tard au Kulturpalast de Dresde, ce programme est aujourd’hui donné pour la première fois en France et enregistré en direct pour Alkonost Classic, le label du quatuor. L’organiste de Notre-Dame de Paris y mêle, comme il aime à le faire, les trois facettes de son art : la composition, l’improvisation et l’interprétation. 

Dans une lettre d’octobre 1777 à son père Leopold, Wolfgang Amadeus Mozart s’extasiait : «À mes yeux et à mes oreilles, l’orgue est le roi des instruments.» À Salzbourg, où il était au service du prince-archevêque Hieronymus von Colloredo, il put assouvir cette passion pendant deux ans (1779-1781) comme organiste de la cour et de la cathédrale. De 1772 à 1780, Mozart composa pour son employeur dix-sept sonates d’église, courtes pièces en un mouvement intercalées, dans les offices, entre la lecture de l’épître et celle de l’Évangile. Celles composées pendant les années où il était organiste, comme cette Sonate KV 336 (336d) de 1780, sont de véritables petits concertos pour orgue.
La Fantaisie en fa mineur KV 608 (1791) a été composée, comme la Fantaisie KV 594 et l’Andante KV 616, pour l’orgue mécanique à rouleau que possédait le comte Joseph von Deym dans son cabinet de curiosités. Le clou était un mausolée à la mémoire du maréchal Laudon, le vainqueur de Belgrade, récemment disparu. L’imposant orgue en accompagnait les visites – payantes. Le caractère de la Fantaisie est à la mesure des circonstances, entre le pathos de l’Allegro, le lyrisme recueilli de l’Adagio central et la solennité des passages fugués qui s’intercalent.
Le 26 juin 1788, Mozart inscrivit l’Adagio et Fugue en ut mineur KV 546 dans le catalogue de ses œuvres. Mais si l’Adagio, avec ses angles acérés et ses lourds silences, était nouveau, la Fugue était antérieure de cinq ans. À son installation à Vienne en 1781, le jeune Mozart avait en effet rencontré un érudit néerlandais, le baron Gottfried van Swieten, qui l’avait abreuvé de fugues de Bach. L’enthousiasme marqué pour cette forme par Constanze Weber, que Mozart venait d’épouser, n’est certainement pas étranger à la composition de cette fugue le 29 décembre 1783, initialement pour deux pianos.

Organiste, Sigfrid Karg-Elert laisse un grand nombre d’œuvres pour son instrument et pour l’harmonium, dans un langage très poétique à la frontière entre le postromantisme de Max Reger ou Richard Strauss et l’impressionnisme de Debussy. Ce concert permet de redécouvrir les versions originales du ravissant Sanctus et de la plus turbulente Pastorale, composées vers 1903 et perdues. Emmanuel Pélaprat, organiste lui-même et passionné par l’harmonium, les a reconstituées d’après les notes de l’auteur et les arrangements qu’il en a réalisés pour violon et orgue. 

L’Andante sostenuto (1847) et le Capriccio (1843) sont la première et la troisième de quatre pièces pour quatuor à cordes de Felix Mendelssohn Bartholdy publiées après sa mort. Ces Quatre Pièces op. 81 furent même imprimées et jouées comme « Septième Quatuor » de Mendelssohn : une entreprise fantaisiste, puisque que leur composition s’étale sur vingt ans. L’Andante sostenuto est un thème et variations, et le Capriccio un Andante suivi d’un vivifiant Fugato.
 
Les Six Duos pour harmonium et piano naquirent au printemps 1858, à l’époque où Camille Saint-Saëns fréquentait assidûment les salons parisiens. Le jeune homme de 21 ans y retrouve l’harmonium, instrument dont Alexandre Debain avait déposé le brevet en 1842 et auquel il avait consacré dix ans plus tard son opus 1, Trois Morceaux. Deux des duos sont ici transcrits pour orgue et quatuor, l’espiègle Capriccio et l’ample Finale, à la grandeur orchestrale.

– Claire Delamarche

Escaich, Prana

Composition : 2022.
Création : Cologne, Philharmonie, 5 octobre 2022, par Thierry Escaich (orgue) et le Quatuor Tchalik.

Cette pièce est comme un long cérémonial où se succèdent deux mélodies incantatoires, qui semblent l’une provenir de chants que l’on pourrait associer à l’Afrique, et l’autre évoquer des réminiscences grégoriennes. Ces mélodies se déploient sur un lit de cellules répétitives, lesquelles créent un balancement irrégulier qui évolue au fil de l’œuvre. Comme à travers une sorte de vitrail, les différents motifs entrent en dialogue avec une superposition de textures qui sont renforcées par les différents plans sonores de l’orgue. Même si l’orgue s’oppose parfois au quatuor, c’est surtout la fusion de l’orgue et des cordes qui est recherchée. C’est dans cette alliance sonore que s’achève l’évocation du «souffle de vie» qui donne son titre à la pièce*.

– Thierry Escaich

* Prāṇa signifie «souffle de vie» en sanskrit.

L’ORGUE DE L’AUDITORIUM

L’ORGUE EN BREF

Les facteurs d’orgue :
Aristide Cavaillé-Coll (1878)
Victor Gonzalez (1939)
Georges Danion/S. A. Gonzalez (1977)
Michel Gaillard/Manufacture Aubertin (2013)

Console :
Christophe Cailleux/Organotech (2024)

Construit pour l’Exposition universelle de 1878 et la salle du Trocadéro, à Paris, cet instrument monumental (82 jeux et 6300 tuyaux) fut la «vitrine» du plus fameux facteur de son temps, Aristide Cavaillé-Coll. Les plus grands musiciens se sont bousculés à la console de cet orgue prestigieux, qui a révélé au public les Requiem de Maurice Duruflé et Gabriel Fauré, le Concerto pour orgue de Francis Poulenc et des pages maîtresses de César Franck, Charles-Marie Widor, Marcel Dupré, Olivier Messiaen, Jehan Alain, Kaija Saariaho, Édith Canat de Chizy, Thierry Escaich ou Philippe Hersant. Remonté en 1939 dans le nouveau palais de Chaillot par Victor Gonzalez, puis transféré en 1977 à l’Auditorium de Lyon par son successeur Georges Danion, cet orgue a bénéficié en 2013 d’une restauration par Michel Gaillard (manufacture Aubertin) qui lui a rendu sa splendeur. La variété de ses jeux lui permet aujourd’hui d’aborder tous les répertoires, de Bach ou Couperin aux grandes pages romantiques et contemporaines. C’est, hors Paris (Maison de la Radio et Philharmonie), le seul grand orgue de salle de concert en France. Depuis octobre 2024, il bénéficie d’une console neuve, conçue et réalisée par Christophe Cailleux/Organotech. 

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